Comprendre l'émission d'obligations

Souvent associée aux grands groupes ou aux pratiques du XIXème siècle, l'émission obligataire est un mode de financement particulièrement apprécié des ETI et actionnable même pour des PME.
Essayons d'y voir plus clair sur ce grand méconnu.


Les PME disposent de plusieurs outils de façon à financer leur développement : financement bancaire, financement par augmentation de capital, mécanismes de crédit d’impôt permettant le financement public de l’innovation ou de la recherche, emprunts inter-entreprises… et le financement obligataire, qui passe par une émission de titres de dette (les obligations).

Un titre de dette est un titre financier qui matérialise l’engagement d’un emprunteur envers un prêteur qui, en contrepartie, met des fonds à sa disposition. Cet engagement prévoit un échéancier de flux financiers qui définit les modalités de remboursement des fonds et un mode de rémunération du prêteur dans l’intervalle.

Le prix d’une obligation ne traduit pas sa cherté, seul le taux de rentabilité actuariel de l’obligation (qui annule sa VAN, c’est-à-dire la différence entre son prix et la valeur actuelle des flux futurs) permet de classer les différentes opportunités offertes à l’investisseur (en fonction du risque et de la durée). Sur le marché secondaire, le taux de rentabilité actuariel ne représente qu’un coût d’opportunité pour l’émetteur : c’est le coût auquel il pourrait se réendetter aujourd’hui.

Les paramètres des obligations

Les paramètres de base des obligations sont les suivants :

  • valeur nominale ou valeur faciale ou pair
  • prix d’émission assorti éventuellement d’une prime (ou d’une décote) par rapport à la valeur nominale
  • amortissement : remboursement in fine, par amortissement constant, par annuités constantes. Il est également parfois possible de rembourser une partie du capital par anticipation
  • durée de vie moyenne : elle correspond à la moyenne des durées de vie de chacune des tranches de l’emprunt lorsque que celui-ci est remboursé en plusieurs fois
  • date de jouissance : c’est la date à partir de laquelle les intérêts commencent à courir
  • taux facial : c’est le taux du coupon
  • prime d’émission/de remboursement : c’est la différence entre le prix d’émission et la valeur nominale/entre le prix de remboursement et la valeur nominale
  • périodicité : c’est la fréquence de versement des intérêts. Lorsque les intérêts ne sont versés qu’au moment du remboursement de l’emprunt après avoir été capitalisés, on parle d’emprunts coupon zéro
  • les intérêts sont soit précomptés (versés au début de la période sur laquelle ils sont calculés), soit postcomptés.

La diversité de ces paramètres explique pourquoi le taux de rentabilité actuariel peut différer du taux du coupon.

Les titres à taux fixe

Les titres de dette à taux fixe sont exposés à un risque de taux : la valeur d’un titre de dette à taux fixe monte quand les taux baissent et vice versa. Cette fluctuation se mesure par :

  • la sensibilité, qui mesure la variation en pourcentage de la valeur d’une obligation induite par une petite variation du taux d’intérêt. La sensibilité est fonction de la date d’échéance de l’obligation, de son taux facial et du taux du marché
  • la convexité, dérivée seconde du cours par rapport au taux d’intérêt, qui exprime la rapidité de son appréciation ou de sa dépréciation si les taux baissent ou montent
  • un risque de réinvestissement des coupons : il existe un horizon pour lequel un portefeuille est immunisé, c’est-à-dire protégé contre le risque de fluctuation des taux d’intérêt (risque en capital et risque de réinvestissement des coupons) : c’est la duration, égale au rapport des flux actualisés et pondérés par le nombre d’années à la valeur actuelle du titre de dette.

Les titres à taux variable

Les titres de dette à taux variable ont un coupon qui n’est pas fixe, mais indexé sur un taux de marché (avec une marge fixe ajoutée au taux variable dans la détermination du coupon). Les obligations à taux variable sont des titres très peu volatils, même si leur valeur n’est pas toujours égale à 100 % du nominal.

Tous les titres de dette sont exposés à un risque de solvabilité apprécié par les agences de rating (Standard & Poor’s, Moody’s…) via des notes (AAA, AA, A, BBB…) qui dépendent de la volatilité de l’actif économique et de la structure financière de l’émetteur. La conséquence en est la marge ou spread, écart entre le taux de rentabilité actuariel de l’obligation et celui d’un emprunt sans risque de durée identique. Ce spread est naturellement d’autant plus faible que la solvabilité de l’émetteur est perçue comme bonne.

Les conditions pour mettre en place un financement obligataire

L’émission obligataire pour la PME donne lieu à une émission de titres (les obligations) si bien que les sociétés par actions (SA, SAS, SCA), même nouvellement créées, sont les premières sociétés à être éligibles, moyennant le respect de conditions relativement simples : capital social entièrement libéré, vérification actif/passif si la société a moins de deux ans d’existence. La décision est en principe du ressort de l’organe d’administration de la société (conseil d’administration), du ou des gérants, sauf disposition statutaire contraire.

La SARL peut également avoir recours à ce type de financement, mais à des conditions plus strictes : elle doit avoir 3 ans d’existence, remplir certains critères de taille et mettre à disposition des souscripteurs un document d’information et une notice relative aux conditions d’émission. La décision est du ressort de l’assemblée générale des actionnaires.

Les principaux avantages des émissions obligataires

Le financement par émission obligataire est une solution de financement moyen à long terme. Les taux pratiqués, selon les financements, varient de 5 à 12%, soit un coût, certes plus élevé que celui de l’emprunt bancaire, mais moins que celui lié à un financement en equity. Les investisseurs (institutionnels - fonds obligataires - ou non), apportent le financement au terme d’un contrat d’émission de titres, fixant toutes les conditions relatives au remboursement notamment, et prévoyant le cas échéant des garanties (par exemple sur des actifs immobiliers, des stocks…).

Il a également l’avantage, par rapport au financement bancaire, de permettre un remboursement in fine du montant du financement (seuls les intérêts étant remboursés avant l’échéance, ce qui permet de préserver les cash flow de la PME).

Il permet aussi de couvrir des besoins traditionnellement non financés par les acteurs bancaires, comme les investissements immatériels, les projets de recherche et développement ou les opérations purement capitalistiques.

Il offre enfin aux dirigeants fondateurs une véritable alternative à l’equity, bien moins onéreuse et surtout non dilutive.

L’émission obligataire permet de financer tout type de projets

Le financement obligataire permet de financer des projets de développement et de croissance des PME, qui ne sont traditionnellement pas finançables par de la dette bancaire. Il est ainsi possible de financer tout type de projet, dans tous les secteurs tels que :

  •  la croissance externe : opérations de rachat d’autres entités ou branches, généralement en complément d’un financement bancaire et equity
  •  la croissance organique : projets immatériels (recherche et développement), financement ou refinancement d’actifs matériels ou immatériels, développement interne (embauches, marketing, IT)
  •  les opérations de transmission de capital : rachat par des salariés ou le management de la PME (autrement appelé « MBO » - Manager-By-Out), ou par des acteurs extérieurs à la PME (autrement appelé « MBI » - Manager-by-In), ou par les fondateurs/dirigeants en permettant la sortie d’actionnaires minoritaires (autrement appelé « OBO » - Owner-by-Out).

Pour aller plus loin

Le PDF de la Banque de France


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